Traductions et imitations de
Quand'io son tutto volto...
Le Préambule des innombrables
««« Canzoniere 18 »»»































Textes modernisés


TRADUCTIONS
IMITATIONS
1548, Philieul, traduction.
1575, Du Tronchet, traduction.
1600, Maldeghem, traduction.


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Canzoniere, 18 : Quand'io son tutto volto in quella parte...
1555 (1548) - Vasquin PHILIEUL, Toutes les Œuvres vul- gaires de Pétrarque, I, sonnet 11, p. 15, traduction.
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[««« Philieul »»»]

    Quand je suis tout tourné vers celle part,
Où de beauté est la fleur singulière :
Dont me demeure en l'esprit sa lumière
Si fermement, qu'onc n'en fera départ.
    Je doute fort que mon cœur, qui en ard,
D'ennui ne fende (et sur l'heure dernière)
Mais d'un aveugle en ce suis la manière,
Qui ne sait point où va, au fort s'en part.
    Ainsi je fuis de mort la dure atteinte,
Mais peu me vaut : d'autant que mon martyre,
Où que je sois faut que toujours y vienne.
    Sans bruit languis : mais ma morte complainte
Ferait pleurer les gens, et je désire,
Que mon gref deuil secret dans moi se tienne.
»» texte original ««« ~#~ »»»
ARGUMENT selon Philieul : Il allait d'Avignon à Vaucluse, & par le chemin se contournant quelquefois devers Avignon, fit ce Sonnet. Et puis être arrivé le soir à Vaucluse, se souvenant d'avoir laissé sa dame un peu malade, à la contemplation des étoiles fit le Sonnet ensuivant.








Canzoniere, 18Quand'io son tutto volto in quella parte...
1595 (1575) - Étienne DU TRONCHET, Lettres amoureuses, sonnet 18, p. 241, traduction.
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[««« Du Tronchet »»»]

ALors que tout tourné je suis en celle part
Où luit souvent Madame en beauté singulière
Et que m'est jointe au cœur la lueur coutumière,
Laquelle me détrait et ard de part en part.
    Moi qui crains que mon corps de moi fasse départ
Voyant proche la fin de ma clarté première
Comme aveugle je vois privé de sa lumière
Qui ne sait où il va, toutefois il s'en part.
    Ainsi devant les coups de mort j'échappe et fuis,
Mais si tôt mon désir éloigner je ne puis
Qu'il ne se trouve prompt (comme il sait) à me prendre.
    Tacitement ainsi mon chemin je poursuis,
Car mon deuil découvert ferait pleurer, et puis
Je désire mes pleurs toutes seules épandre.
»» texte original ««« ~#~ »»»








Canzoniere, 18 : Quand'io son tutto volto in quella parte...
1606 (1600) - Philippe de MALDEGHEM, Le Pétrarque en rime française, sonnet 16, p. 35, traduction.
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[««« Maldeghem »»»]

    Lorsque comme transi je suis totalement,
Où que luit la splendeur du beau front de ma dame,
Et qu'au penser je sens sa clair-luisante flamme,
Qui peu à peu me mine et ard entièrement.
    Craignant du cœur, qui cause à moi tel différend,
Et rayant ma lumière en point pour rendre l'âme,
Je vais comme un aveugle, ou cil qui en mer rame,
Sans savoir où qu'il va, se donnant à tout vent.
    Devant les coups mortels ainsi je prends la fuite,
Mais non si vitement que je n'aye conduite
Du désir, à me suivre étant accoutumé,
    Je m'en vais sans parler, afin que jà la morte
Parole, à quelqu'un autre aucun ennui n'apporte,
N'aimant point qu'en mes pleurs je soye accompagné.
»» texte original ««« ~#~ »»»
COMMENTAIRE DE MALDEGHEM : Il dit ici pourquoi il fuit quelquefois le regard de Mme Laure, ce qui est, que quand il est où qu'elle est, lui étant demeuré en la pensée combien est admirable sa beauté & combien qu'elle opère en lui ardant & consumant, il se part, voyant approcher par l'ardeur la fin de sa vie, qu'il appelle lumière : & ainsi se partant sans la belle vue de Mme Laure il demeure comme aveugle, qui ne sait où qu'il va ; & ainsi il dit, qu'il fuit la mort, mais soudainement l'accompagne le désir de retourner vers icelle lumière de Mme Laure passant secrètement avec paroles, qu'il parlait à soi-même, lesquelles il appelle mortes, pour n'être entendues ou exprimées, & qui feraient pleurer ceux qui les ouiraient.