Madeleine et Catherine DES ROCHES
(1520 ?-1587)    (1542-1587)
Dernier texte en ligne :
1583 : Ô belle Main qui l’arc…

Plutôt apparaîtront mille et mille soleils,
Dans le centre profond de cette lourde masse,
Plutôt seront toujours les hommes sans courroux,
Tous les pensers plutôt se liront en la face,
Que je puisse jamais aimer autre que vous.







L’abbé GOUJET, 1752
 

LES DAMES DES ROCHES,
MÈRE ET FILLE.

Les Dames Des Roches, Mère et Fille, ont eu plus de ré­pu­ta­tion que La Tays­son­nière ; mais leur his­toire n’en est pas plus con­nue. Elles étaient de Poi­tiers, qui s’est fait hon­neur de leur avoir don­né la nais­sance, et de les avoir pos­sé­dées pen­dant tout le temps de leur vie. La Mère se nom­mait Made­leine Neveu. M. Titon Du Tillet dit dans son Par­nasse Fran­çais, qu’elle épou­sa le Sieur Fre­don­noit, Sei­gneur Des Roches ; d’autres avaient dit la même chose avant lui. Mais Ma­dame Des Roches qui a com­po­sé elle-même l’Épi­taphe de son ma­ri, le nomme Fran­çois Ébois­sard, Sei­gneur de La Vil­lée. Voici ce qu’elle lui fait dire dans son Épi­taphe :

Veux-tu savoir, Passant, quel a été mon être ?
Sache que la nature, et fortune, et les Cieux,
Noble, Riche et Savant autrefois m’ont fait naître,
Me rendant possesseur de leurs dons précieux.

Après avoir vécu d’une louable vie,
Je fus pris d’un Caterre…

Je fus trente ans Breton, lié de chaste amour,
Mon âme devant Dieu maintenant se repose,
Et mon corps en ce lieu attend le dernier jour, &c.

Les embar­ras du mé­nage ne ra­len­tirent point l’amour de Ma­dame Des Roches pour les lettres. Libre de tout en­ga­ge­ment, elle avait com­men­cé à les cul­ti­ver ; elle con­ti­nua, de­puis son ma­riage, à leur don­ner tous les mo­ments qu’elle put lé­gi­ti­me­ment ôter à ses autres oc­cu­pa­tions. Elle pos­sé­dait bien la langue Latine, elle n’igno­rait pas l’Ita­lienne, et sa­vait assez la grecque pour être en état de s’en ser­vir dans le besoin. [R]

Elle n’eut de son ma­riage que Cathe­rine Des Roches, qu’elle nour­rit elle-même, et dont elle cul­ti­va soi­gneu­se­ment les heu­reuses dis­po­si­tions pour l’étude, qu’elle appor­ta en nais­sant, et qui se dé­ve­lop­pèrent avec l’âge. Leur mai­son de­vint une espèce d’Aca­dé­mie où se trou­vaient avec sa­tis­fac­tion tous ceux qui à Poi­tiers et aux en­vi­rons avaient quelque goût pour la Lit­té­ra­ture. Ces as­semblées étaient fré­quentes ; les con­ver­sa­tions y étaient vives, ani­mées, au­tant qu’elles étaient utiles ; et tous les Sa­vants ou les beaux esprits de ce temps-là que le de­voir ou la cu­rio­si­té con­dui­saient aux Grands jours de Poi­tiers, ne man­quaient pas de s’y trou­ver. [R]

Scévole de Sainte-Marthe qui s’é­tait pro­cu­ré sou­vent cet avan­tage, dit dans le court pa­né­gy­rique qu’il a con­sa­cré à la mé­moire des Dames Des Roches, que la sa­gesse et la mo­des­tie éga­laient la beau­té et l’éten­due de leur esprit. Ma­de­leine Ne­veu étant de­meu­rée veuve, se con­cen­tra, pour ainsi dire, dans sa fille. L’union fut mu­tuelle ; l’affec­tion fut ré­ci­proque. Cathe­rine Des Roches refu­sa cons­tam­ment les par­tis, même les plus avan­ta­geux, qui lui furent of­ferts, et mé­pri­sa les as­si­dui­tés les plus per­sé­vé­rantes de Julien de Guer­sens, Sé­né­chal de Rennes, dont je vous di­rai un mot ci-après. Elle avait cou­tume de dire, que la mort-même ne pour­rait point la sé­pa­rer de sa mère. Ce que son affec­tion lui fai­sait dé­cla­rer, arri­va en effet. La peste ayant affli­gé la Ville de Poi­tiers en 1587, elles mou­rurent l’une et l’autre le même jour.

[…] [R]

L’abbé GOUJET,
Biblio­thèque fran­çaise,
ou Histoire de la Litté­ra­ture fran­çaise,
tome XIII, 1752, pp. 256-257
[Gallica, NUMM-50656, PDF_282_283]
(texte modernisé).




Liens

Étude

* On lira l’article d’Anne R. Larsen consa­cré à Cathe­rine Fradon­net, fille de Made­leine Des Roches, dans une page du Dictionnaire des Femmes de L’Ancienne France publié par la SIEFAR, Socié­té Inter­na­tio­nale pour l’Étude des Femmes de l’An­cien Ré­gime.

Liens valides au 10/07/19.






En ligne le 05/07/06.
Dernière révision le 20/03/22.