Francesco PETRARCA (1304-1374)
Lyon, Jean de Tournes, 1545, p. 281 [←Gallica].

Da piu begliocchi, e dal piu chiaro viso,
Che mai splendesse, e da piu bei capelli,
Che facean l’Oro e’l Sol parer men belli,
Dal piu dolce parlar, e dolce riso,

Da le man, da le braccia, che conquiso
Senza muouersi haurian quai piu rebelli
Fur d’Amor mai, da piu bei piedi snelli,
Da la persona fatta in Paradiso

Prendean vita i miei spirti, hor n’hà diletto
Il Re celeste, e i suoi alati Corrieri,
Et io son qui rimaso ignudo, e cieco.

Sol vn conforto a le mie pene aspetto,
Ch’ella, che vede tutti i miei pensieri,
M’impetrei gratia, ch’i possa esser seco.

Paris, Gilles Corrozet, 1539, sonnet 6, ff. 3v°-4r° [←Gallica].

Des plus beaux yeux, et du plus clair visage
Qui oncques fut, et des beaux cheveux longs,
Qui faisaient l’or et le soleil moins blonds,
Du plus doux ris, et du plus doux langage,

Des bras et mains qui eussent en servage
Sans se bouger mené les plus félons,
De celle qui du chef jusqu’aux talons
Semblait divin, plus qu’humain personnage,

Je prenais vie. Or d’elle se consolent
Le roi céleste, et ses courriers qui volent,
Me laissant nu, aveugle en ce bas être :

Un seul confort attendant à mon deuil,
C’est que là-haut, elle qui sait mon veuil
M’impètrera qu’avec elle puisse être.

Paris, André Wechel, 1555, Second Livre, f° 34r° [←Gallica].

Et des plus belles mains, qui au cœur plus sauvage,
Soudain feraient sentir d’amour un feu nouveau,
Et du plus beau marcher, qui un gai renouveau
Fait rire sous ses pas, et du plus beau corsage :

Et des yeux les plus beaux, et du plus beau visage,
Et du plus beau sourcil, et du poil le plus beau,
Qui l’or et du soleil éteindrait le flambeau,
Et du ris le plus doux, et du plus doux langage,

Je fus surpris le jour, que d’une atteinte vraie,
Moi qui soulais davant par feinte l’essayer,
Je reçus dans le cœur mon amoureuse plaie.

Amour de son carquois une flèche si belle,
Pour me blesser tira, que ne puis m’ennuyer
De la garder au cœur, bien qu’el’ lui soit mortelle.

Anvers, Chr. Plantin, 1583, La Sévère, I, p. 1104 [←Gallica].

Et des plus beaux cheveux qu’Amour saurait élire,
Pour surprendre nos cœurs dans leurs filets retors :
Et du front le plus beau montrant mille trésors,
Ains l’honneur de ce Dieu, son siège, et son Empire.

Et des yeux les plus beaux qu’on vit jamais reluire,
Pour attraire, et forcer, les moins doux, et plus forts :
Et du sein le plus beau qui repousse au dehors
Un double mont poli d’Albâtre, ou de Porphyre.

Et des plus belles mains qui pourraient arrêter
Quelque Turc, ou Gélon : Amour me vint dompter,
Aussitôt que je vis ma Dame si accorte.

Même afin d’agrandir son pouvoir surhumain,
Depuis ce temps il veut qu’empreints au cœur je porte
Son poil, son front, son œil, sa poitrine, et sa main.

Gramont, Des plus beaux yeux… (1842)   ↓   ↑   ⇑  →t.o.
Poésies de Pétrarque, « Après la mort de Laure »,
Paris, Paul Masgana, 1842, sonnet CCCIV, p. 236 [←Gallica].

énumération des perfections de sa dame

Des plus beaux yeux et du front le plus clair qui ja­mais ait bril­lé, et des plus beaux che­veux qui fai­saient pa­raître moins beaux et l’or et le So­leil ; du plus doux par­ler et du plus doux sou­rire ;

Des mains, des bras qui, sans se mou­voir, au­raient triom­phé des re­belles les plus har­dis qu’Amour trou­va ja­mais ; des pieds agiles, les plus beaux qu’on ait vus, et de toute cette per­sonne for­mée en para­dis,

Mes esprits rece­vaient la vie ; ils charment main­te­nant le Roi des cieux et ses cour­riers ai­lés, et moi je suis res­té ici aveugle et dépouil­lé.

Je n’attends qu’un seul sou­la­ge­ment de mes peines, c’est que celle dont le re­gard pé­nètre toutes mes pen­sées ob­tienne par grâce que je puisse être avec elle.

























Paris, Gilles Corrozet, 1539, sonnet 6, ff. 3v°-4r° [←Gallica].

Des plus beaux yeux, et du plus clair visage
Qui oncques fut, et des beaux cheveux longs,
Qui faisaient l’or et le soleil moins blonds,
Du plus doux ris, et du plus doux langage,

Des bras et mains qui eussent en servage
Sans se bouger mené les plus félons,
De celle qui du chef jusqu’aux talons
Semblait divin, plus qu’humain personnage,

Je prenais vie. Or d’elle se consolent
Le roi céleste, et ses courriers qui volent,
Me laissant nu, aveugle en ce bas être :

Un seul confort attendant à mon deuil,
C’est que là-haut, elle qui sait mon veuil
M’impètrera qu’avec elle puisse être.

Paris, André Wechel, 1555, Second Livre, f° 34r° [←Gallica].

Et des plus belles mains, qui au cœur plus sauvage,
Soudain feraient sentir d’amour un feu nouveau,
Et du plus beau marcher, qui un gai renouveau
Fait rire sous ses pas, et du plus beau corsage :

Et des yeux les plus beaux, et du plus beau visage,
Et du plus beau sourcil, et du poil le plus beau,
Qui l’or et du soleil éteindrait le flambeau,
Et du ris le plus doux, et du plus doux langage,

Je fus surpris le jour, que d’une atteinte vraie,
Moi qui soulais davant par feinte l’essayer,
Je reçus dans le cœur mon amoureuse plaie.

Amour de son carquois une flèche si belle,
Pour me blesser tira, que ne puis m’ennuyer
De la garder au cœur, bien qu’el’ lui soit mortelle.

Anvers, Chr. Plantin, 1583, La Sévère, I, p. 1104 [←Gallica].

Et des plus beaux cheveux qu’Amour saurait élire,
Pour surprendre nos cœurs dans leurs filets retors :
Et du front le plus beau montrant mille trésors,
Ains l’honneur de ce Dieu, son siège, et son Empire.

Et des yeux les plus beaux qu’on vit jamais reluire,
Pour attraire, et forcer, les moins doux, et plus forts :
Et du sein le plus beau qui repousse au dehors
Un double mont poli d’Albâtre, ou de Porphyre.

Et des plus belles mains qui pourraient arrêter
Quelque Turc, ou Gélon : Amour me vint dompter,
Aussitôt que je vis ma Dame si accorte.

Même afin d’agrandir son pouvoir surhumain,
Depuis ce temps il veut qu’empreints au cœur je porte
Son poil, son front, son œil, sa poitrine, et sa main.

Gramont, Des plus beaux yeux… (1842)   ↓   ↑   ⇑  o→
Poésies de Pétrarque, « Après la mort de Laure »,
Paris, Paul Masgana, 1842, sonnet CCCIV, p. 236 [←Gallica].

énumération des perfections de sa dame

Des plus beaux yeux et du front le plus clair qui ja­mais ait bril­lé, et des plus beaux che­veux qui fai­saient pa­raître moins beaux et l’or et le So­leil ; du plus doux par­ler et du plus doux sou­rire ;

Des mains, des bras qui, sans se mou­voir, au­raient triom­phé des re­belles les plus har­dis qu’Amour trou­va ja­mais ; des pieds agiles, les plus beaux qu’on ait vus, et de toute cette per­sonne for­mée en para­dis,

Mes esprits rece­vaient la vie ; ils charment main­te­nant le Roi des cieux et ses cour­riers ai­lés, et moi je suis res­té ici aveugle et dépouil­lé.

Je n’attends qu’un seul sou­la­ge­ment de mes peines, c’est que celle dont le re­gard pé­nètre toutes mes pen­sées ob­tienne par grâce que je puisse être avec elle.

























textes modernisés
[R]

 

En ligne le 09/09/22.
Dernière révision le 24/03/24.