Pierre de RONSARD (1524-1585)
Paris, veuve Maurice de La Porte, 1553.

COmme un Chevreuil, quand le printemps détruit

L’oiseux cristal de la morne gelée,
Pour mieux brouter la feuille emmiellée,
Hors de son bois avec l’Aube s’enfuit :

Et seul, et sûr, loin de chiens et de bruit,
Or sur un mont, or dans une vallée,
Or près d’une onde à l’écart recelée,
Libre folâtre où son pied le conduit.

De rets ni d’arc sa liberté n’a crainte,
Sinon alors que sa vie est atteinte,
D’un trait meurtrier empourpré de son sang :

Ainsi j’allais sans espoir de dommage,
Le jour qu’un œil sur l’avril de mon âge
Tira d’un coup mille traits dans mon flanc.

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de Muret

Comme un Che­vreuil.) Ce son­net est ai­sé de soi. Il est pris de Bem­bo, qui écrit ain­si,

Si come suol, poi che ’l verno aspro e rio
Parte, e dà loco a le stagion migliori,
Uscir col giorno la Cervetta fuori
Del suo dolce boschetto, almo natio:

E hor super un colle, hor lungo d’un rio,
Lontana da le case, et da pastori
Gir secura pascendo herbette e fiori,
Ovunque più la porta il suo desio:

Ne teme di saetta, o d’altro inganno,
Se non quand'ella è colta in mezzo il fianco,
Da buon arcier, che di nascosto scocchi:

Cosi senza temer futuro affano,
Moss’ io Donna quel di, che bei vostr’occhi
Me’mpiagar lasso, tutto ’l lato manco.

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[texte modernisé]
[R]

 
 

En ligne le 21/01/21.
Dernière révision le 21/01/21.