Pierre de RONSARD
(1524-1585)
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Les Amours, 1552

Les Amours augmentées, 1553

Livret de folâtries, 1553

Continuation des Amours, 1555

Dialectique de La Ramée, 1555

Nouvelle continuation des Amours, 1556

Chant pastoral sur les noces…, 1559

Réponse aux injures…, 1563

Œuvres en 7 tomes, 1578, I, Amours,
Amours d’Eurymédon et de Callirée

Sonnets pour Hélène, II

Amours diverses

Les Œuvres, 1584
Amours de Cassandre






~#~







…et mes livres, que j’aime

Plus mille fois,

que toi,

ni que moi-même.



SAINTE-BEUVE, 1876.
~ Mlle de Gournay
et les défenseurs
de Ronsard après sa mort ~

En 1623, c’est-à-dire cinq années seu­le­ment avant la mort de Malherbe, pa­rut sous les aus­pices de Nico­las Riche­let la ma­gni­fique édi­tion in-folio de Ron­sard. Ce fut comme autour de ce mo­nu­ment sa­cré que se ral­lièrent pour une der­nière fois les dé­fen­seurs du poëte ; ils vou­laient, ainsi qu’un d’entre eux l’a dit, arra­cher du tom­beau de leur maître cette mau­vaise herbe (mala herba) qui étouf­fait son lau­rier. Claude Gar­nier, D’Urfé, Des Yve­teaux, Hardy, Guil­laume Colle­tet, Por­chères, La Mothe-Le-Vayer, fi­gurent au pre­mier rang par­mi ces cham­pions de la vieille cause ; mais au­cun d’eux n’appor­ta dans la que­relle au­tant d’ar­deur et moins de mé­na­ge­ments que la fille adop­tive de Mon­taigne, la digne et res­pec­table ma­de­moi­selle de Gournay. Cette sa­vante de­moi­selle ren­dait à la mé­moire de Ron­sard le même culte de vé­né­ra­tion qu’à celle de son père d’al­liance, et elle avait en quelque sorte con­sa­cré le reste de sa vie au ser­vice et à l’en­tre­tien de leurs deux au­tels. Lorsqu’elle vit la cri­tique gram­ma­ti­cale qui n’épar­gnait pas Mon­taigne s’achar­ner sur Ron­sard, et re­le­ver dans ses œuvres les tours iné­lé­gants et les mots su­ran­nés, elle eut un mo­ment l’idée de re­tou­cher et de po­lir à sa fa­çon les poé­sies du Chantre ven­dô­mois, puis de les don­ner au pu­blic comme un texte nou­vel­le­ment dé­cou­vert. On sa­vait en effet que, durant les der­nières années de sa vie, Ron­sard avait ten­té de re­ma­nier ses pre­miers ouvrages. Mais Colle­tet, qu’elle con­sul­ta au su­jet de cette fraude pieuse, l’en dé­tour­na comme d’un sa­cri­lège. Elle se bor­na donc à guer­royer pour Ron­sard et les vieux en chaque occa­sion, tou­jours sans suc­cès, sou­vent avec rai­son et jus­tice. Nous ci­te­rons, de ses di­vers opus­cules trop peu con­nus, quelques pas­sages non moins re­mar­quables par l’au­dace des doc­trines que par la vi­ri­li­té de l’expres­sion :

« Ô Dieu, dit-elle dans son Traité des Mé­ta­phores, quelle ma­la­die d’esprit est celle de cer­tains poëtes et cen­seurs de ce temps, sur le lan­gage et sur la poé­sie spé­cia­le­ment hé­roïque, plus éman­ci­pée ! Voyez-les éclai­rer et ton­ner sur la cor­rec­tion de ces deux ma­tières : est-il rien de plus mer­veil­leux ? Et combien est-il mer­veil­leux encore qu’un des points ca­pi­taux de leur règle soit l’in­ter­dic­tion ab­so­lue des mé­ta­phores, hors celle qui courent les rues !… Éclats et cen­sures, s’il vous plaît, non seu­le­ment pour dé­gra­der les Muses de leur ma­jes­té su­perbe, quand ils ne les dé­gra­de­roient que du seul droit des mé­ta­phores, mais aussi pour les em­ba­boui­ner de sor­nettes et pour les parer de bi­joux de verre comme épou­sées de vil­lage, au lieu de les or­ner et les orien­ter de perles et de dia­mants, à l’exemple des grandes prin­cesses… Regar­dons, je vous sup­plie, si les Arts poé­tiques d’Aris­tote, de Quin­ti­lien, d’Ho­race, de Vida, de Sca­li­ger et de plu­sieurs autres, se fondent, comme celui des gens dont il est ques­tion, sur la gram­maire, mais encore une gram­maire de re­but et de des­truc­tion, non de cul­ture, d’ac­crois­se­ment et d’édi­fi­ca­tion… Vous diriez, à voir faire ces mes­sieurs, que c’est ce qu’on re­tranche du vers, et non pas ce qu’on y met, qui lui donne prix ; et, par les de­grés de cette consé­quence, celui qui n’en fe­roit point du tout se­roit le meil­leur poëte… Certes, aime­rois-je au­tant voir jouer de l’épi­nette sur un ais que d’ouïr ou de par­ler le lan­gage que la nou­velle bande appelle main­te­nant pur et poli… Belle chose vrai­ment pour tant de per­sonnes qui ne savent que les mots, s’ils savent per­sua­der au pu­blic qu’en leur dis­tri­bu­tion gise l’essence et la qua­li­té d’un écri­vain !… […] Que nous pro­fite aussi d’être riches en po­lis­sure, si nous po­lis­sons une crotte de chèvre ?… »

Dans une sorte de pamphlet apo­logé­tique adres­sé à Mme Des Loges et in­ti­tu­lé Dé­fense de la Poé­sie et du Lan­gage des Poëtes, Mlle de Gour­nay attaque la ques­tion encore plus au vif, s’il est pos­sible :

« Je sors, s’écrie-t-elle en son exorde ab irato, je sors d’un lieu où j’ai vu je­ter au vent les véné­rables cendres de Ron­sard et des poëtes ses con­tem­po­rains, au­tant qu’une im­pu­dence d’igno­rants le peut faire, bros­sant en leurs fan­tai­sies, comme le san­glier échauf­fé dans une fo­rêt… »

C’est là qu’il faut l’entendre ma­gni­fi­que­ment parler des

« œuvres si plan­tu­reuses de cette com­pa­gnie de Ron­sard, œuvres re­lui­santes d’hy­po­ty­pose ou pein­ture, d’in­ven­tion, de har­diesse, de gé­né­ro­si­té, et dont la vive, flo­ride et poé­tique ri­chesse au­to­ri­se­roient trois fois au­tant de li­cences, s’ils les avoient usur­pées. […] »

Ainsi di­sait Mlle de Gour­nay ; mais de si élo­quentes la­men­ta­tions furent gé­né­ra­le­ment mal com­prises, et ne ser­virent qu’à lui don­ner, par­mi les let­trés à la mode, la ri­di­cule ré­pu­ta­tion d’une sy­bille oc­to­gé­naire, gar­dienne d’un tom­beau. Ce fut donc au mi­lieu des rires et des quo­li­bets qu’elle chan­ta l’hymne fu­né­raire de cette école expi­rante, dont quatre-vingts années au­pa­ra­vant, Du Bellay avait en­ton­né l’hymne de dé­part et de con­quête, au mi­lieu de tant d’applau­dis­se­ments et de tant d’espé­rances.

SAINTE-BEUVE,
Tableau de la Poésie française au XVIe siècle,
édition définitive, 1876, tome premier, pp. 275-282
[Gallica, NUMM-39247, PDF_340_347].

Et en son feu mon feu désembraser

 
 

Liens

Émissions

* Les 30 émis­sions d’Une his­toire lan­ga­gière de la lit­té­ra­ture d’Hen­ri Van Lier (dif­fu­sées pour la pre­mière fois sur France Culture en 1989) peuvent être écou­tées sur une page du site anthro­po­ge­nie.com. La qua­trième de ces émis­sions est consa­crée à Maurice Scève et à Ron­sard, entre autres poètes du sei­zième siècle.

[liens valides au 18/03/24]


Compte-rendu de publication

* On peut lire, sur Fabula, Ron­sard, le sang et l’amour, compte rendu par Claire Botti­neau de Le sang embau­mé des roses. Sang et pas­sion dans la poé­sie amou­reuse de Pierre de Ron­sard, livre de Marc Carnel paru chez Droz en 2004.

[liens valides au 18/03/24]





En ligne le 01/01/05.
Dernière révision le 18/03/24.