Francesco PETRARCA (1304-1374)
Lyon, Jean de Tournes, 1545, p. 143 [←Gallica].

Ponmi, oue’l Sol occide i fiori, e l’herba,
O doue vince lui’l ghiaccio, e la neue:
Pommi, ou’è’l carro suo temprato, e leue,
Et ou’è chi cel rende, o chi cel serba:

Pomm’in humil fortuna, od in superba,
Al dolce aere sereno, al fosco, e greue:
Pommi a la notte, al di lungo, & al breue,
A la matura etate, od a l’acerba:

Pomm’in Cielo, od in terra, od in abisso,
In alto poggio, in valle ima, e palustre,
Libero spirto, od a suoi membri affisso:

Pommi con fama oscura, o con illustre:
Sarò, qual fui: viurò, com’io son visso,
Continuando il mio sospir trilustre.

Avignon, B. Bonhomme, 1555, I, sonnet CXLII, p. 134 [←Gallica].

Mets-moi où est le Soleil trop ardent,
Ou, où de froid nul ne peut soulager.
Mets-moi où est son char doux et léger,
Ou, où se lève, ou delà l’Occident.

Mets-moi berger, ou Prince, ou Président,
En bon pays, ou qu’on n’ose héberger,
Ou jeune, ou vieil, ou mets-moi à songer,
Ou à veiller, en lieu plat ou pendant.

Mets-moi au ciel, aux abys, ou en terre,
En haut coteau, en vallée ou marais,
Ou vif, ou mort, ou en paix, ou en guerre,

Clair, ou obscur : toujours tel vous m’aurez
Comme ai été, comme ai vécu vivrai,
Et mes soupirs jà tri-lustres suivrai.

Paris, veuve M. de La Porte, 1552, livre I, p. 30 [←Gallica].

Mets-moi au bord d’où le Soleil se lève,
Ou près de l’onde où sa flamme s’éteint,
Mets-moi aux lieux que son rayon n’atteint,
Ou sur le sable où sa torche est trop grève.

Mets-moi en joie ou douleur longue ou brève,
Liberté franche, ou servage contraint,
Mets-moi au large, ou en prison retreint,
En assurance ou doute, guerre ou trêve.

Mets-moi aux pieds ou bien sur les sommets
Des plus hauts monts, Ô Méline, et me mets
En ombre triste, ou en gaye lumière,

Mets-moi au ciel, dessous terre mets-moi,
Je serai même, et ma dernière foi
Sera sans fin égale à ma première.

Les Premières Œuvres, Les Amours d’Hippolyte,
Paris, Robert Estienne, 1573, XXIII, f° 109r° [←Gallica].

Mettez-moi sur la mer quand elle est courroucée,
Ou quand les vents légers soufflent plus doucement,
Sous les eaux, en la terre, au haut du firmament,
Vers la ceinture ardente, ou devers la glacée :

Que ma fortune soit deçà delà poussée,
Bien haute aucunefois, quelquefois bassement :
Que mon nom glorieux vive éternellement,
Ou que du temps vainqueur soit ma gloire effacée :

Jeune ou vieil, près ou loin, content ou malheureux,
Que j’aie Amour propice, ou fier et rigoureux,
Que mon âme aux enfers, ou aux cieux s’achemine :

Jamais en mon esprit, tant que serai vivant,
On ne verra sécher cette plante divine,
Que des eaux de mes pleurs j’arrose si souvent.

Le Pétrarque en rime française, Durant la vie de Laure,
Douai, F. Fabry, 1606, sonnet CXIV, pp. 207-208 [←Gallica].

Mettez-moi où Phébus les fleurs et l’herbe tue,
Ou là où par la glace et neige il est vaincu :
Mettez-moi où son char est moins chargé de feu,
Ou d’où qu’il vient, ou là, où nous perdons sa vue.

Mettez-moi en fortune ou haute ou inconnue,
À l’air doux et serein, au sombre et corrompu :
Mettez-moi à la nuit au jour court, au parcru
Mettez-moi grise ayant la joue ou toute nue,

Mettez-moi en la terre, ou en un lac sans fond
Au ciel, sur un mont haut, ou en un val profond,
Et que l’âme sans corps j’aie, ou bien au corps jointe.

Mettez-moi en renom obscur ou loin connu,
Je serai, je vivrai ainsi que j’ai vécu,
Suivant de mes soupirs jà tri-lustres la pointe.

L’Amour victorieux, L’Harmonie,
Paris, G. Robinot, 1609, sonnet CXC, f° 201r° [←Gallica].

Soit que je vive où le jour se réveille,
Ou près du bord où sa lumière faut,
Ou dessous l’air qui fait naître le chaud,
Ou sous le vent qui le froid appareille :

Soit que je vive en gloire non-pareille,
En renom sombre, en degré bas ou haut,
Ou jeune, ou vieil, en âge qui défaut,
Semblable au cours d’une rose vermeille.

Soit que je vive en terre, ou dans les Cieux,
Ou dessous l’onde, ou sous les plus bas lieux,
Ou dans la ville, ou dedans les bocages :

Soit que je vive en disgrâces, ou non,
Triste ou content, selon mes apanages,
Toujours mes vers chanteront votre nom.

Poésies de Pétrarque, « Du vivant de Laure »,
Paris, Paul Masgana, 1842, sonnet CXIII, p. 110 [←Gallica].

quel que soit son sort, son amour ne changera pas.

Mettez-moi où le Soleil fait pé­rir les fleurs et l’herbe, comme où la glace et la neige triomphent de lui ; mettez-moi où son char est lé­ger et mo­dé­ré, et aux lieux où habitent ceux qui nous le rendent, ou bien ceux qui nous l’en­lèvent ;

Mettez-moi dans une humble ou su­perbe for­tune ; sous un air doux et serein, ou bien né­bu­leux et lourd ; mettez-moi dans la nuit, sous les jours longs ou courts, dans la sai­son avan­cée ou bien ado­les­cente ;

Mettez-moi dans le ciel, ou sur la terre ou dans l’abîme ; sur une haute mon­tagne, dans la val­lée pro­fonde et ma­ré­ca­geuse ; esprit libre ou bien as­su­jet­ti à son corps ;

Mettez-moi avec un nom obs­cur ou illustre : je se­rai tel que je fus, je vi­vrai comme j’ai vé­cu, en conti­nuant mes sou­pirs qui datent de trois lustres.

























Avignon, B. Bonhomme, 1555, I, sonnet CXLII, p. 134 [←Gallica].

Mets-moi où est le Soleil trop ardent,
Ou, où de froid nul ne peut soulager.
Mets-moi où est son char doux et léger,
Ou, où se lève, ou delà l’Occident.

Mets-moi berger, ou Prince, ou Président,
En bon pays, ou qu’on n’ose héberger,
Ou jeune, ou vieil, ou mets-moi à songer,
Ou à veiller, en lieu plat ou pendant.

Mets-moi au ciel, aux abys, ou en terre,
En haut coteau, en vallée ou marais,
Ou vif, ou mort, ou en paix, ou en guerre,

Clair, ou obscur : toujours tel vous m’aurez
Comme ai été, comme ai vécu vivrai,
Et mes soupirs jà tri-lustres suivrai.

Paris, veuve M. de La Porte, 1552, livre I, p. 30 [←Gallica].

Mets-moi au bord d’où le Soleil se lève,
Ou près de l’onde où sa flamme s’éteint,
Mets-moi aux lieux que son rayon n’atteint,
Ou sur le sable où sa torche est trop grève.

Mets-moi en joie ou douleur longue ou brève,
Liberté franche, ou servage contraint,
Mets-moi au large, ou en prison retreint,
En assurance ou doute, guerre ou trêve.

Mets-moi aux pieds ou bien sur les sommets
Des plus hauts monts, Ô Méline, et me mets
En ombre triste, ou en gaye lumière,

Mets-moi au ciel, dessous terre mets-moi,
Je serai même, et ma dernière foi
Sera sans fin égale à ma première.

Les Premières Œuvres, Les Amours d’Hippolyte,
Paris, Robert Estienne, 1573, XXIII, f° 109r° [←Gallica].

Mettez-moi sur la mer quand elle est courroucée,
Ou quand les vents légers soufflent plus doucement,
Sous les eaux, en la terre, au haut du firmament,
Vers la ceinture ardente, ou devers la glacée :

Que ma fortune soit deçà delà poussée,
Bien haute aucunefois, quelquefois bassement :
Que mon nom glorieux vive éternellement,
Ou que du temps vainqueur soit ma gloire effacée :

Jeune ou vieil, près ou loin, content ou malheureux,
Que j’aie Amour propice, ou fier et rigoureux,
Que mon âme aux enfers, ou aux cieux s’achemine :

Jamais en mon esprit, tant que serai vivant,
On ne verra sécher cette plante divine,
Que des eaux de mes pleurs j’arrose si souvent.

Le Pétrarque en rime française, Durant la vie de Laure,
Douai, F. Fabry, 1606, sonnet CXIV, pp. 207-208 [←Gallica].

Mettez-moi où Phébus les fleurs et l’herbe tue,
Ou là où par la glace et neige il est vaincu :
Mettez-moi où son char est moins chargé de feu,
Ou d’où qu’il vient, ou là, où nous perdons sa vue.

Mettez-moi en fortune ou haute ou inconnue,
À l’air doux et serein, au sombre et corrompu :
Mettez-moi à la nuit au jour court, au parcru
Mettez-moi grise ayant la joue ou toute nue,

Mettez-moi en la terre, ou en un lac sans fond
Au ciel, sur un mont haut, ou en un val profond,
Et que l’âme sans corps j’aie, ou bien au corps jointe.

Mettez-moi en renom obscur ou loin connu,
Je serai, je vivrai ainsi que j’ai vécu,
Suivant de mes soupirs jà tri-lustres la pointe.

L’Amour victorieux, L’Harmonie,
Paris, G. Robinot, 1609, sonnet CXC, f° 201r° [←Gallica].

Soit que je vive où le jour se réveille,
Ou près du bord où sa lumière faut,
Ou dessous l’air qui fait naître le chaud,
Ou sous le vent qui le froid appareille :

Soit que je vive en gloire non-pareille,
En renom sombre, en degré bas ou haut,
Ou jeune, ou vieil, en âge qui défaut,
Semblable au cours d’une rose vermeille.

Soit que je vive en terre, ou dans les Cieux,
Ou dessous l’onde, ou sous les plus bas lieux,
Ou dans la ville, ou dedans les bocages :

Soit que je vive en disgrâces, ou non,
Triste ou content, selon mes apanages,
Toujours mes vers chanteront votre nom.

Poésies de Pétrarque, « Du vivant de Laure »,
Paris, Paul Masgana, 1842, sonnet CXIII, p. 110 [←Gallica].

quel que soit son sort, son amour ne changera pas.

Mettez-moi où le Soleil fait pé­rir les fleurs et l’herbe, comme où la glace et la neige triomphent de lui ; mettez-moi où son char est lé­ger et mo­dé­ré, et aux lieux où habitent ceux qui nous le rendent, ou bien ceux qui nous l’en­lèvent ;

Mettez-moi dans une humble ou su­perbe for­tune ; sous un air doux et serein, ou bien né­bu­leux et lourd ; mettez-moi dans la nuit, sous les jours longs ou courts, dans la sai­son avan­cée ou bien ado­les­cente ;

Mettez-moi dans le ciel, ou sur la terre ou dans l’abîme ; sur une haute mon­tagne, dans la val­lée pro­fonde et ma­ré­ca­geuse ; esprit libre ou bien as­su­jet­ti à son corps ;

Mettez-moi avec un nom obs­cur ou illustre : je se­rai tel que je fus, je vi­vrai comme j’ai vé­cu, en conti­nuant mes sou­pirs qui datent de trois lustres.

























textes modernisés
[R]

 

En ligne le 21/12/17.
Dernière révision le 28/05/22.