Vasquin PHILIEUL (1522-?)
La mer n’a point…
Avignon, B. Bonhomme, 1555 (Paris, 1548).

La mer n’ha point dedans ses haultes ondes
Tant d’animaulx, ne par dessus la lune
Voit tant passer d’astres aucune nuict,
Ny tant d’oyseaulx hebergent par les bois,
Ny tant de fleurs eut onques pré ne plage,
Que mon cœur ha d’ennuis un chacun soir.

De iour en iour i’attens le dernier soir,
Qui de mes yeulx ferme les tristes ondes,
En me laissant dormir en quelque plage:
Car onc mortel n’endura soubz la lune
Autant que moy, tesmoins en sont les bois,
Dans qui tout seul ie uague iour & nuict:

Ie n’eus iamais une tranquille nuict:
Mais souspiray depuis matin & soir,
Qu’amour me fit un citoien des bois.
Quand i’auray paix, la mer sera sans ondes,
Et au soleil donra clarté la lune,
Et fleurs d’Auril mourront par toute plage.

Ie me consume allant de plage en plage.
De iour pensif, plorant toute la nuict,
Suis sans repos comme est la belle lune:
Et tout soubdain que uois uenir le soir,
Souspirs du cueur, des yeux fais si grands ondes,
Qu’arrozent champs, & font crosler les bois.

Ie hais la uille, & aime mieux les bois:
Car quand ie suis en ceste doulce plage,
Vais deschargeant auec le bruit des ondes
Mes griefz trauaulx dessoubz la coye nuict,
Et quand est iour ie n’attens que le soir,
Que le soleil donne place à la lune.

Las fusse ie ore au uague de la lune
Bien endormy dedans quelques uerts bois:
Et celle là, qui faict uenir le soir
Trop tost pour moy, uint seule en celle plage
Auecques moy demeurer une nuict,
Et le iour fust tout temps delà les ondes.

Sur ondes faicte, aux rayons de la lune,
Et de nuict née, o Chanson, dans les bois,
Verras demain tres riche plage au soir.

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La mer nha point dedans ſes haultes ondes
Tant danimaulx, ne par deſſus la lune
Voit tant paſſer daſtres aucune nuict,
Ny tant doyſeaulx hebergent par les bois,
Ny tant de fleurs eut onques pré ne plage,
Que mon cœur ha dennuis un chacun ſoir.

De iour en iour iattens le dernier ſoir,
Qui de mes yeulx ferme les tries ondes,
En me laiſſant dormir en quelque plage:
Car onc mortel nendura ſoubz la lune
Autant que moy, teſmoins en ſont les bois,
Dans qui tout ſeul ie uague iour & nuict:

Ie neus iamais une tranquille nuict:
Mais ſouſpiray depuis matin & ſoir,
Quamour me fit un citoien des bois.
Quand iauray paix, la mer ſera ſans ondes,
Et au ſoleil donra clarté la lune,
Et fleurs dAuril mourront par toute plage.

Ie me conſume allant de plage en plage.
De iour penſif, plorant toute la nuict,
Suis ſans repos comme est la belle lune:
Et tout ſoubdain que uois uenir le ſoir,
Souſpirs du cueur, des yeux fais ſi grands ondes,
Quarrozent champs, & font crosler les bois.

Ie hais la uille, & aime mieux les bois:
Car quand ie ſuis en ceſte doulce plage,
Vais deſchargeant auec le bruit des ondes
Mes griefz trauaulx deſſoubz la coye nuict,
Et quand eſt iour ie nattens que le ſoir,
Que le ſoleil donne place à la lune.

Las fuſſe ie ore au uague de la lune
Bien endormy dedans quelques uerts bois:
Et celle là, qui faict uenir le ſoir
Trop toſt pour moy, uint ſeule en celle plage
Auecques moy demeurer une nuict,
Et le iour fuſt tout temps delà les ondes.

Sur ondes faicte, aux rayons de la lune,
Et de nuict née, o Chanſon, dans les bois,
Verras demain tres riche plage au ſoir.

 

En ligne le 10/09/05.
Dernière révision le 14/04/24.